Dans un numéro de Yi Mag ( sur le site de la FFWaemc) un pratiquant s’interroge sur l’apparition possible de grades en Qi Gong !
Je vous conseille, si cet aspect de nos pratiques vous intéresse, d’aller consulter ce site.Quant à moi, j’ai envie de faire le point à ma façon sur cette « innovation ».

Pour moi, un grade est un repère qui permet de situer un pratiquant par rapport à une norme, mais aussi de situer les pratiquants entre eux.

D’un côté rien de plus « normal » (précisément !). Mais d’un autre côté toute la question consiste à savoir de quelle norme et de quelle discipline il s’agit .

Parlons du Qi Gong.
Première constatation : il existe de très nombreuses écoles de Qi Gong, toutes aussi respectables les unes que les autres.
C’est la première difficulté : laquelle doit faire autorité pour servir de « norme »? Selon quels critères ? Et surtout qui va en décider?
Seconde constatation : le Qi Gong est un ensemble de pratiques visant à permettre au pratiquant d’améliorer son « mieux-être » dans tous les domaines de la santé, le couple « corps-esprit » formant une unité indissociable.
C’est la deuxième difficulté : quel type de « mieux-être » va être mis en avant pour servir de « norme » ? Question stupide me semble-t-il, étant entendu que le « mieux-être » est un ensemble de sensations tout à fait subjectives et variables à l’infini d’une personne à l’autre. Le « mieux-être » est affaire de qualité, non de quantité. Qui va le mesurer ? Avec quels appareils ? Comment établir une « norme » en la matière?
Ou alors il faut entrer dans le domaine de la médecine, mais précisément nous ne sommes plus dans celui du Qi Gong.
Enfin troisième constatation : la notion de grade suppose la notion de comparaison entre les « gradés ». On parle volontiers de « hauts gradés », suggérant par là qu’il existe des « moins gradés », voire des « sans grade ». A supposer même que l’on puisse mesurer mon « mieux-être », je ne vois pas bien en quoi ma recherche personnelle peut bénéficier d’une comparaison avec celle d’une autre personne ? Si mon voisin tire de sa pratique un grand profit, j’en suis bien sûr ravi pour lui, mais qu’est-ce que sa réussite (ce serait d’ailleurs pareil en cas d’échec) a à voir avec ma propre pratique ? Nous ne sommes pas en « concurrence de mieux-être » que je sache !

C’est un petit peu comme si on voulait créer des grades dans les monastères ! Avec des matchs de méditation, de prières et pourquoi pas tant que nous y sommes de sagesse ou de …sainteté !!! Avec un arbitre, des joueurs et bien sûr l’indispensable public de supporters pour encourager son champion ! Merveilleux non ?! En réalité la notion de grade suppose l’existence d’une norme « officielle », mais aussi d’une hiérarchie « officielle ».
Dans le domaine des arts martiaux, les grades ont pour fonction de situer les pratiquants par rapport aux « normes techniques » de leur discipline mais aussi par rapport à leur valeur de « combattant ». Le grade est donc légitime et présente une signification claire : les individus sont mis en compétition et comparés les uns aux autres dans le cadre d’une structure officielle qui fait autorité. D’où l’existence d’une hiérarchie qui peut être très motivante pour beaucoup : devenir le « champion » reconnu, être le meilleur, le « number One » de la discipline.
La poursuite de la victoire à tout prix est devenue l’essence même de la démarche sportive aujourd’hui.
Qu’il est loin le temps où le Baron de Coubertin déclarait que « l’essentiel n’est pas de gagner mais de participer » ! C’était le temps des « amateurs ». Nous sommes à l’ère des « pros ». Pourquoi pas ? Cela peut présenter un réel intérêt et a le mérite de clarifier le fonctionnement d’une discipline sportive en contrôlant certains risques d’éparpillement et de dérapages éthiques ou commerciaux. 

Mais en Qi Gong ? Ce n’est pas du tout la même situation et rien de tout cela ne devrait se retrouver.