Yang Chengfu, créateur de la forme Yang traditionnelle que nous pratiquons, père de Maître Yang Zhenduo et arrière grand- père de maître Yang Jun, a énoncé les dix principes fondamendaux qui doivent guider le pratiquant dans sa recherche de l’essence du Taïji-Quan. Il s’agit de principes, donc de conseils d’une portée universelle mais qui doivent être étudiés et approfondis de façon adaptée et non aveugle ou « automatique », dans la pratique concrète de la Forme, selon la progression de chacun.

 

Voici la liste de ces dix principes essentiels de la pratique du style Yang de Taiji Quan.

Chaque principe fera l’objet d’un bref commentaire technique inspiré du livre « Yang style Taiji Quan », paru en anglais en 1988 à Hong Kong et à Pékin.
Cet ouvrage présente, à l’aide de plus de 500 photographies expliquées, toute la Forme exécutée par Maître Yang Zhenduo.

Les dix principes :

1 - Maintenir l’esprit vivant (la conscience) au sommet de la tête.
2 – Contenir la poitrine et dresser le dos.
3 – Relâcher la taille.
4 – Distinguer le « vide » et le « solide ».
5 – Abaisser les épaules et laisser tomber les coudes.
6 – Utiliser la conscience et non la force physique.
7 – Coordonner le mouvement entre le bas et le haut.
8 – Maintenir l’harmonie entre l’interne et l’externe.
9 – Lier et dérouler le mouvement sans interruption.
10 – Garder la tranquillité au sein du mouvement.

Premier principe : "Maintenir la conscience au sommet de la tête."

Cela veut dire garder la tête et le cou bien droits, mais sans raideur.
Un bon moyen d’y parvenir est d’avoir la sensation qu’un lien léger relie le sommet de notre crâne au ciel.
Ainsi le regard est naturellement au niveau de l’horizon et la tête portée avec souplesse.
On éprouve une sensation de présence et de vigilance. L’énergie circule librement.

Un enseignant facétieux traduisait un jour ce premier principe : « En pratiquant la Forme, ne cherchez pas les champignons» !
Un autre disait : « Quand vous pratiquez, tenez la tête hors de l’eau » !

Choisissez la formule qui vous plaira le plus !

Deuxième principe : "Contenir la poitrine et dresser le dos.""

Attention, pas d’excès de zèle ! Il ne s’agit pas de « creuser » la poitrine, mais plutôt de ne pas la bomber !
Bomber le torse revient à emprisonner et à comprimer le souffle dans la poitrine, avec pour conséquence d’entraver la liberté de la respiration et « d’alourdir » la partie supérieure du corps.
La partie inférieure est alors « légère » et les pieds donnent l’impression de flotter.

Il s’agit d’obtenir exactement le contraire !

Relâcher la poitrine (peut-être « rentrera-t-elle » un peu) c’est libérer le souffle et le laisser descendre tranquillement vers le dantian (bas-ventre).
Le dos se redressera et s’allongera alors tout seul avec une sensation de détente.
Car « dresser le dos » en taiji quan n’a rien à voir avec la position bien connue et un peu caricaturale du « garde à vous » règlementaire !
Si la poitrine est correctement relâchée (contenue), la colonne dorsale constitue le « mât » qui soutient naturellement le corps et auquel la respiration, donc le Qi, adhère en s’exprimant à partir de cet axe vertébral.

Troisième principe : "Relâcher la taille."

Qu’entend-on par « taille » dans notre pratique ?
Il s’agit d’un ensemble formant une unité homogène qui comprend le bassin et la ceinture lombaire.
La taille constitue l’assise du corps humain.
Une taille détendue, bien équilibrée (« relâchée ») permet aux membres inférieurs d’être solides et stables, procurant ainsi au corps une base d’action ferme.

Tous les mouvements en taiji quan dépendent de l’action de la taille aussi dit-on : « La force vitale vient de la taille ».

Quatrième principe : Distinguer le « vide » et le « solide ».

Si tout le poids de votre corps repose entièrement sur votre jambe gauche, celle-ci est alors solidement plantée dans le sol, elle est dite « solide » ou « pleine » ou encore « substantielle »

Votre jambe droite, elle, ne supporte alors aucun poids ; elle est dite « vide » ou «insubstantielle ».

De même, dans le cas contraire : un mouvement de déplacement, un changement de direction ne pourront s’effectuer avec agilité et légèreté qu’à la condition de prendre le temps de réaliser pleinement cette distinction entre le solide et le vide. Sinon les déplacements resteront lourds, maladroits voire désordonnés et le pratiquant sera facilement déséquilibré par la moindre poussée.

Cinquième principe : "Abaisser les épaules et laisser tomber les coudes."

« Abaisser les épaules » ne veut pas dire les tirer volontairement vers le bas, ce qui serait une source de tension supplémentaire.
Une manière consiste à sentir ses omoplates glisser et « rouler » naturellement, de façon détendue, ce qui permet aux épaules, souvent crispées, de se détendre à leur tour sans y penser et de se placer toutes seules en position naturelle.

« Laisser tomber les coudes » signifie relaxer le bras et l’avant-bras et les positionner de façon telle que le coude « tombe » naturellement vers le bas, cependant que les épaules restent détendues.
Cette attitude juste des épaules et des coudes permet à l’énergie de s’exprimer sans remonter vers le haut, laissant au corps toute sa force.

Les commentaires des cinq principes suivants feront très prochainement l’objet d’un autre article.

JC B